De tous les cadeaux qu’on aurait pu lui faire, Calypso et Kayin lui avaient offert le plus inestimable, le plus précieux ; ces offrandes qu’un tiers ne pourrait pas vraiment comprendre, tant bien même il essaierait. En quittant son travail à Azkaban, Marie avait abandonné ses plus profondes convictions ; sa passion la plus étrange ; ses espoirs et son amour pour la recherche. Tout ceci, elle ne l’avait fait que pour le bien de sa famille. Sa seule et unique raison. La motivation qui transcendait tout le reste. En faisant ce sacrifice, elle témoignait à sa manière tout l’amour qu’elle accordait à ses parents, à ses frères et sœurs, aux Layibadé qui avaient besoin de son soutien. Autrefois, elle se serait déchirée entre sa loyauté et ses convictions, mais la situation avait changé. Plus que jamais la famille devait être soudée.

Quand on lui avait montré son nouveau centre de recherche, caché dans les dédales du nouveau Mangrove, sa salle de torture (bien que le mot lui paraissait fort déplaisant) à elle, Marie avait arrêté de douter. Tout lui paraissait plus clair, plus limpide. Elle pouvait continuer de faire ce qui lui plaisait, et c’était sa famille qui le lui permettait. Rien ne l’avait jamais autant motivé. Et pour commencer en beauté, on offrait en pâture au lion les brebis égarées. Avec la perte du Mangrove à Londres, les propriétés de Calypso avait fui sans faire preuve de respect à celle qui les avait nourri, logé, offert une raison de vivre. Traîtrise. Leur petite escapade n’avait pas duré très longtemps : il avait suffit d’un rien pour qu’on en récupère trois, quoi que récupérer fut un bien grand mot. On ne récupère pas des fuyardes, on leur donne uniquement ce qu’elles méritent. Et Marie n’allait pas tarder à inaugurer son nouveau cadeau, se laisser aller à ses pulsions les plus morbides. Dans quelques minutes, elle arracherait à sa victime ses secrets les mieux gardés, accompagnée de Darwin qui avait accepté de l’épauler dans sa tâche.

D’un pas rapide, elle traverse les couloirs et descend, balançant sa chevelure tressée au rythme de sa démarche décidée. D’une main elle tient sa baguette, de l’autre une trousse médicale qui ne servira pas à soigner qui que ce soit. Prestement, elle se retrouve devant la porte mais avant même qu’elle n’ouvre la porte, deux voix s’étaient distinguées dans le silence de l’étage. La moldue pensait pouvoir compter sur l’aide de Darwin. Adorable, pensa Marie en poussant finalement la porte pour se révéler à la lumière de la pièce. Tout était en place, parfaitement coordonné. Darwin avait fait du bon travail, comme toujours. Elle lui adressa un sourire courtois, quoi qu’elle n’y mit aucune joie. Ses yeux étaient braqués sur l’ancienne prostituée, dévorant du regard toute la terreur qu’elle pouvait interpréter sur son visage. « Tu pensais certainement te retrouver face à Calypso … Ou Kayin. » Au même instant où elle prononça ces mots, elle déposa la trousse sur la petite table de travail et attira à elle par un sort rapide une paire de gants stérilisés. « Crois-moi, tu aurais sans doute préféré. » Fit-elle en enfilant les gants. Elle se tourna ensuite face à la traîtresse, sans s’être départie de son sourire qui avait néanmoins mué en un rictus agressif. « On ne se connaît pas je crois. Je suis Marie. » Elle n’avait pas le souvenir de l’avoir déjà croisé ; quoi qu’il aurait été peu probable qu’elle se souvienne d’elle de toute manière. « Loin d’être enchantée cela dit. » Elle souffla du nez avant de se tourner à nouveau vers la table.

Elle ouvrit la trousse pour étaler ses instruments sur la table, inspectant un à un chaque outil qui lui servirait dans la longue soirée qui allait se dérouler. Elle pourrait commencer par n’importe lequel, le résultat se solderait de la même façon, peu importe l’ordre. Mais elle avait cette envie persistante de faire durer la séance. « J’imagine que je n’ai pas besoin d’expliquer pourquoi je suis là ; tu sais bien quelle erreur tu as commis. » Marie avait prononcé ça du bout des lèvres sans quitter des yeux son matériel, mais elle sentait bien que la fille s’agitait dans son dos. Mais pour le peu dont elle s’en préoccupait, elle préféra orienter son attention sur Darwin. « Tu peux rester si tu veux. » Il n’était pas obligé d’assister à la scène, en théorie ; elle avait davantage besoin de ses services après, mais elle était habituée à la présence de ses anciens collègues et Darwin ne la dérangeait pas. Restait à savoir si lui, ça le dérangeait de regarder quelqu’un qu’il connaissait se faire disséquer.